Les actionnaires d'ArcelorMittal ne doivent pas craindre les taxes américaines -DJ Plus
02 June 2018 - 12:11AM
Bourse Web Dow Jones (French)
François Schott,
Agefi-Dow Jones
PARIS (Agefi-Dow Jones)--L'entrée en vigueur ce vendredi de
surtaxes douanières sur les importations américaines d'acier et
d'aluminium a suscité l'ire des principaux partenaires économiques
des Etats-Unis, Union européenne en tête, qui a porté plainte
devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Le Mexique et le
Canada ont également annoncé une riposte.
Mais l'impact de ces mesures doit être relativisé en ce qui
concerne les sidérurgistes européens, et particulièrement français.
En 2017, l'Union européenne a expédié 5 millions de tonnes d'acier
vers les Etats-Unis, soit moins de 3% de sa production, selon des
chiffres de la fédération européenne Eurofer. La France y a exporté
moins de 2% de sa propre production.
Comme l'a souligné Philippe Darmayan, président d'ArcelorMittal en
France, ce vendredi sur France Info : "cela fait des années que les
Américains sont protectionnistes sur l'acier", ces surtaxes ne
faisant que s'ajouter à des mesures existantes. Conséquence : ce
sont essentiellement des produits à forte valeur ajoutée qui font
le voyage d'Europe vers l'Amérique, car ils sont par nature moins
sensibles aux taxes pouvant renchérir leur prix.
A court terme, l'instauration de ces barrières douanières aura
surtout un effet sur le marché américain, où les prix de l'acier
ont déjà commencé à augmenter, portés par une demande domestique
robuste. Selon l'agence Standard & Poor's, "les taxes vont
encourager la production américaine d'acier et d'aluminium,
augmenter le taux d'utilisation des capacités, et maintenir les
prix à des niveaux élevés pendant les deux à trois prochaines
années".
Une aubaine pour les sidérurgistes implantés aux Etats-Unis, en
particulier pour ArcelorMittal qui dispose de six sites de
production aux Etats-Unis et y réalise 20% de son chiffre
d'affaires. Les analystes de Credit Suisse ont d'ailleurs réaffirmé
vendredi leur recommandation "surperformer" sur le numéro un du
secteur, en raison de son exposition à la hausse des prix
américains.
Prudent, le groupe s'est gardé de tout commentaire concernant ses
perspectives aux Etats-Unis, préférant se ranger derrière la
fédération européenne de l'acier, Eurofer, pour réclamer des
mesures protectionnistes... en Europe. ArcelorMittal craint en
effet que "les 30 millions de tonnes d'acier qui devaient aller
naturellement aux États-Unis se retournent vers le marché le plus
ouvert, c'est-à-dire l'Europe", entraînant l'effet inverse sur la
production et les prix de ce côté de l'Atlantique.
Les fondamentaux restent solides
Là-encore, ces craintes doivent être tempérées. Après plusieurs
années de réduction des capacités de production, la sidérurgie
européenne est mieux armée pour absorber les chocs de marché que
par le passé. La reprise européenne, même si elle semble se tasser
depuis le début de l'année, tire la demande adressée à l'industrie
métallurgique. Par ailleurs la Chine, régulièrement accusée par les
producteurs européens d'inonder le marché d'acier à bas coûts, a
entrepris un programme de ses capacités de production qui a
largement contribué au redressement des prix mondiaux au cours des
deux dernières années.
Le secteur reste dans un cercle vertueux de hausse de la demande et
de réduction des capacités qui devraient continuer à soutenir les
prix sur le long terme, souligne Credit Suisse. Mais la banque
n'exclut pas des cahots boursiers cet été en raison notamment des
incertitudes politiques au sein de la zone euro et des
interrogations sur la croissance mondiale.
Par ailleurs, le secteur sidérurgique ne sortirait pas indemne
d'une guerre commerciale plus large entre les Etats-Unis et ses
principaux partenaires. "Si on fait un scénario catastrophe avec
des mesures de représailles européennes entraînant des mesures de
représailles américaines sur l'automobile, effectivement, cela peut
conduire à un ralentissement de la production européenne", a
indiqué Philippe Darmayan ce vendredi sur France Info.
Pour l'heure la Bourse n'envisage un tel scénario. En hausse de
1,5% vendredi, en ligne avec le rebond des marchés européens, le
titre ArcelorMittal reste proche de son plus haut niveau depuis
quatre ans. Son ex-filiale Aperam, spécialisée dans l'acier
inoxydable présente en Europe et au Brésil, bondit de près de
3%.
En dépit de l'entrée en vigueur des taxes américaines, et des
représailles attendues de la part de l'Union européenne, les
discussions se poursuivent entre les deux partenaires. Il n'est
impensable qu'un terrain d'entente soit trouvé rapidement. En
attendant, cette guerre des nerfs ne joue pas forcément en défaveur
des producteurs d'acier.
-François Schott, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 92;
fschott@agefi.fr ed: ECH
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